Je discutais dernièrement avec une personne adepte du développement personnel et de ses nombreuses méthodes mais par contre fort peu convaincue des effets de la méditation.
Assez rapidement la conversation prit le tour d'une comparaison entre l'efficacité de la pleine conscience et celle de toutes les pratiques auxquelles elle s'adonnait. Avec en point d'orgue la question-massue : "depuis que tu médites, qu'est-ce que ça t'a apporté?"
Que répondre à une telle question tant la méditation est personnelle puisqu'elle consiste en un retour patient et persévérant sur soi, sans viser quelque chose de spécial? C'est ce que je tentai d'expliquer. La réponse jaillit aussitôt: "ça va pas assez vite!"
Immédiatement, cela me ramena aux propos de Patricia Genoud lors d'une retraite :
"La méditation fonctionne, mais c'est une pratique très lente, parce qu'elle est extrêmement respectueuse des résistances."
Comme souvent avec Patricia ou son époux Charles, on pourrait encadrer ce type de phrase et y réfléchir longtemps tant c'est riche et juste, en dépit d'une économie de mots remarquable.
En effet la méditation ne brusque rien, puisqu'elle est avant tout acceptation:
de ce qui se passe à l'instant t
de la manière dont nous l'appréhendons
de nos forces
de nos faiblesses
les trois derniers points variant aussi dans le temps.
Et c'est tout? Pas de recette miracle? Pas de méthode pour instantanément "aller mieux", une sorte d'aspirine spirituel sensé tout arranger rapidement?
Eh bien non. Simplement faire face à ce qui est là sans réticence ni saisie, même si cela signifie être capable de rester en présence de son malaise. Une sorte de lucidité sereine permettant de faire avec ce qui est sans y rajouter de digressions, de jugements, sans dépenser d'énergie à le parer d'oripeaux plus ou moins effrayants ou au contraires magnifiques. La Réalité, aussi nue que la Vérité du moment. Et aucune volonté de "soigner" quoi que ce soit (s'il te plaît, répare-moi), car rien ni personne n'est malade (ni cassé!)
Décrit comme cela, ce n'est peut-être pas très attirant. Mais comme le disait l'un des participants au cycle d'automne qui vient de s'achever, ce changement de point de vue, si mineur semble-t-il à première vue, est le point de départ d'une réaction en chaîne étonnante qui amène progressivement plus de sérénité, et aide à répondre au lieu de réagir de manière automatique. A condition bien sûr de continuer à pratiquer régulièrement et avec modération ce qui est enseigné pendant le cycle.
Alors oui, c'est long. Oui, les "progrès" ne sont pas linéaires ni réguliers. Mais quand quelque chose dans votre vie se dénoue, quand une résistance de longue date cède, cette victoire, si petite soit-elle, est extrêmement gratifiante et encourageante. Et surtout, elle est pérenne, et vous ne le devez qu'à vous, à votre travail d'introspection. La méditation n'est qu'un outil, l'important est de le manier régulièrement.
Alors que choisir? Se hâter lentement ou bien céder à des méthodes attirantes car nouvelles, bien marketées avec les buzzwords en vogue, mais où l'on vous vend avant tout que vous avez besoin de ressources extérieures, là où la méditation vous invite à découvrir, utiliser et entretenir vos propres ressources?
Souvenons-nous que la tortue finit par arriver à destination avant le lièvre parce qu'elle suit à son rythme et avec persévérance son chemin.
Et qu'il est inutile de tirer sur la fleur pour qu'elle pousse plus vite...
Merci Richard. En calligraphie chinoise, on parle de « vitesse lente ». Celle qui permet au QI de s’installer. Selon Wang Xi Zhi, le premier des 8 traits fondamentaux, un trait horizontal, se dessine de manière « lè » qui peut se traduire par « freiner ». Freiner son pinceau pour tenter de faire passer son QI apporte par ailleurs une forme de plaisir insoupçonnable… c’est cette vitesse lente que l’on retrouve aussi dans le QI gong qui permet d’être « respectueux des résistances » (jolie formule soit dit en passant !), je dirai même de les dépasser et de travailler en profondeur notre corps, lui redonner une souplesse précieuse. Bon appétit en chinois se dit Man Man Ch…